Cinquième rencontre des musées inclusifs

Au début de l’année a eu lieu la 5ème rencontre des musées inclusifs au Musée des enfants Creaviva / Centre Paul Klee à Berne sur les conditions d’une inclusion durable dans les musées. Animée par le Service Culture inclusive de Pro Infirmis, cette manifestation a réuni plus d’une centaine de participants de toute la Suisse. Au programme figuraient une table ronde, la présentation de quatre projets et un marché aux projets avec une vingtaine de prestataires de mesures d’accessibilité.

Par Carol Lagrange

Podium consacré aux musées inclusifs, à Berne

Photo: Paola Pitton

Depuis 2013, Pro Infirmis organise par le biais de son Service Culture inclusive une rencontre rassemblant diverses institutions culturelles pour promouvoir l’inclusion et donner des pistes de réflexion à celles qui souhaitent s’investir dans des projets inclusifs. Pour la première fois en 2019, la rencontre était nationale et traduite simultanément en allemand, français et en langue des signes allemande.

Le service en question est d’ailleurs responsable de décerner le label « Culture inclusive » aux institutions culturelles suisses qui s’engagent durablement sur la voie de l’inclusion et de la participation culturelles en développant leur accessibilité et en favorisant ainsi l’inclusion de personnes avec un handicap.

Les enjeux de l’accessibilité culturelle

En première partie de la journée, une table ronde a permis d’échanger sur la situation de l’inclusion culturelle dans la société. Fabienne Eggelhöfer, conservatrice en chef du Centre Paul Klee, a indiqué que de nombreux visiteurs avec une déficience intellectuelle sont venus au musée Paul Klee pour « Touchdown », une exposition sur et avec des personnes porteuses du syndrome de Down. Elle conserve un excellent souvenir de cette parité atteinte à l’occasion de cette manifestation. L’enjeu est évidemment de savoir comment transformer cela en projet durable.

Dani Suter, le directeur d’Augusta Raurica (Augst), a continué la discussion. « L’accessibilité doit être notre quotidien. Il faut éliminer les angoisses et les barrières, mais sans argent et sans l’engagement du personnel, ça ne peut pas marcher », explique-t-il. Il fait de l’inclusion une priorité : les mesures d’inclusion prévues pour la ville antique sont en effet intégrées à un manuel de gestion de la qualité élaboré par son équipe. Ces mesures font également partie des objectifs annuels de ses collaboratrices et collaborateurs. De plus, il a créé un poste à temps partiel de responsable du projet d’inclusion. Cette dernière apporte ses conseils à toute l’équipe.

Véronique Lombard, Responsable de l’unité Publics et programmation culturelle de la Ville de Genève, a ensuite pris la parole pour expliquer la situation favorable à Genève, à savoir que le département de la culture et du sport a établi des objectifs pour tendre vers l’inclusion, tels qu’une communication ciblée aux différents publics pour une participation active, l’acquisition de ressources humaines supplémentaires avec des responsables dédiés à l’accueil des publics et la mise à disposition de moyens financiers pour soutenir des projets. Madame Lombard a souligné que l’idéal serait de pouvoir adapter une mesure développée pour un public à plusieurs publics. Il faudrait en fait concevoir la question des publics en même temps que le produit culturel. « On n’en est pas encore là, mais ça arrivera un jour », dit-elle avec confiance.

Puis, c’est Christian Lohr, conseiller national à Kreuzlingen, lui-même en situation de handicap, qui est intervenu pour constater que le plus grand défi n’est pas de parler des personnes concernées, mais de travailler avec elles main dans la main pour trouver des solutions inclusives.

Retour d’expériences inclusives

La suite de la journée a été consacrée à la présentation de quatre projets inclusifs durables qui ont donné quelques pistes à étudier pour les musées souhaitant devenir des institutions culturelles inclusives: intégrer l’inclusion dans une structure organisationnelle en engageant une ressource supplémentaire, sensibiliser le personnel du musée, placer le médiateur au même niveau que le conservateur, travailler et vivre ensemble avec les personnes en situation de handicap sur différents projets, se mettre en relation avec les organisations s’engageant auprès des personnes concernées.

Handicap visuel et aides à l’accessibilité

Durant trois plages horaires, les participants ont pu visiter un « marché aux projets » et échangé avec une vingtaine de prestataires d’aides à l’accessibilité suisses et étrangers. Les exposants ont entre autres informé sur l’audiodescription, les moyens auxiliaires tactiles, les aides à l’orientation, la communication accessible, la langue des signes et le langage simplifié. Six de ces prestataires ont présenté des outils ou des offres spécifiquement accessibles aux personnes en situation de handicap visuel. Hörfilm Schweiz y a présenté son offre auditive pour les musées et ses prestations de conseil à ces derniers. L’Ecole de la pomme avait un stand pour expliquer l’importance des smartphones et des tablettes comme outils favorisant l’accessibilité dans les musées. La société berlinoise MindTags, créée il y a trois ans, a montré son système de navigation GPS qui fonctionne via une app. Ce système permet à tous les publics de s’orienter dans un musée grâce à des signaux placés sur les objets d’une exposition par exemple et retransmis directement sur l’application du visiteur. La Blindenschule de Zollikofen était également présente pour présenter les aides tactiles qu’elle peut mettre à la disposition des musées. Tactile Studio, entreprise fondée en France il y a quelques années, propose en France, en Allemagne, en Angleterre, en Autriche, en Italie et au Canada des tours de ville tactiles en collaboration avec des organisations typhlophiles. Elle conseille aussi les musées et leur propose des outils tactiles, en braille ou en gros caractères. Enfin, l’association L’art d’inclure, active en Suisse romande, a exposé un bas-relief tactile afin de lancer la discussion sur le développement de formats inclusifs comme par exemple la visite descriptive.

 

Le label « Culture inclusive » s’adresse aux institutions culturelles pionnières et aux novices qui souhaitent s’engager sur la voie de l’inclusion. Les porteurs de label s’engagent à mettre en œuvre durablement des mesures définies individuellement dans cinq champs d’activité (offre culturelle, accès aux contenus, accès architectural, offres d’emploi, communication) pour six publics (déficiences auditives, déficiences visuelles, déficiences motrices, déficiences intellectuelles, troubles psychiques, handicap dû à l‘âge). Plus d’informations sur le site https://www.kulturinklusiv.ch/fr à la rubrique Porteurs de label.

Plus d’informations auprès de Nicole Grieve pour les partenariats en Suisse romande et au Tessin à grieve@kulturinklusiv.ch ou au 058 775 15 53 et à Sarah Stocker pour les partenariats en Suisse alémanique et au Tessin à stocker@kulturinklusiv.ch ou au 058 775 15 52