Une jeune femme aveugle marche sur le trottoir avec sa canne blanche, au bras de sa maman.
Pour les jeunes présentant une déficience visuelle, la relation avec leurs parents reste très importante à l’âge adulte. / Photo: Shutterstock.com

À l’aube de leur carrière professionnelle et de leur vie d’adultes, les jeunes en situation de déficience visuelle sont souvent confrontés à des défis spécifiques. Initiée par l’UCBA, une nouvelle étude préliminaire examine comment ils parviennent à accroître leur autonomie et à optimiser leurs ressources, pourquoi la recherche et le travail pratique exigent encore tant de réponses et quelles solutions existent déjà.

Par Michel Bossart, rédaction tactuel

Que sait réellement la science sur le bien-être qu’éprouvent ou non les personnes en situation de déficience visuelle âgées de 18 à 35 ans ? Vivianne Visschers, responsable de la recherche à l’UCBA, explique : « Durant leur scolarité et leur formation, les jeunes en situation de déficience visuelle sont accompagnés et préparés à la vie d’adulte, mais une fois leur formation terminée, ils sortent du système et sont livrés à eux-mêmes. Certes, il existe divers services de consultation, mais peu de jeunes y font appel, soit parce qu’ils s’en sortent bien par eux-mêmes, soit parce qu’ils ne connaissent pas cette prestation ou qu’ils n’en voient pas l’utilité. »
En se penchant sur la bibliographie des recherches effectuées jusqu’ici, Vivianne Visschers n’a pu que constater que la dernière étude suisse sur ce thème remontait à 2008 (cf. Ursula Hofer, « Appréciation des offres éducatives institutionnelles pour l’intégration professionnelle et sociale de jeunes adultes malvoyants ou aveugles »). « À l’époque, Ursula Hofer avait déjà mis le doigt sur certains problèmes, mais honnêtement, je ne sais pas comment les résultats de l’étude ont été exploités », concède Vivianne Visschers. Elle a poursuivi sa quête d’informations – notamment internationales – à ce sujet et a organisé des échanges sur les conclusions apportées avec un réseau suisse de chercheurs.

Collaboration avec la FHNW
En collaboration avec la Haute école spécialisée du nord-ouest de la Suisse (FHNW) ont été identifiés cinq champs de recherche liés aux jeunes adultes en situation de déficience visuelle, à savoir le bien-être psychologique, le travail/la carrière professionnelle, l’intégration sociale, le partenariat et la parentalité, ainsi que l’intervention. Cinq étudiants ont examiné ces champs plus en détail lors d’un travail de recherche succinct. « Les résultats de ces approfondissements ont souligné l’importance de l’autonomie et de l’indépendance pour les jeunes adultes concernés », explique Vivianne Visschers. Des indices semblent révéler que leur développement psychologique est légèrement moins rapide par rapport à celui des enfants sans déficience. Rien d’étonnant à cela, car durant l’adolescence, les jeunes voyants ont plus de facilité à se détacher de leurs parents. En effet, souvent, les jeunes adultes concernés demeurent tributaires de leur entourage, notamment pour se rendre du point A au point B ou pour accéder tout simplement à l’information. Ainsi, leur relation avec leurs parents reste pour eux très importante à l’âge adulte. En outre, « leur cercle d’amis ne semble pas aussi solide que celui de leurs contemporains voyants », précise Vivianne Visschers. D’une part, leur environnement social est plus restreint en raison de leur déficience visuelle et, d’autre part, il semble qu’au terme de leur scolarité, ils perdent plus vite le contact avec leurs camarades que les jeunes voyants. Ils sont dépendants de leurs parents ainsi que de leurs frères et soeurs. Cela peut devenir problématique lorsque leurs parents ne sont plus en mesure de leur apporter ce soutien ou que leurs frères et soeurs déménagent pour fonder leur propre famille », explique Vivianne Visschers.

Portraitaufnahme von Vivianne Visschers
Vivianne Visschers / Photo: zVg

Prochaine étape, les entretiens
Les entretiens avec les personnes concernées constituent un élément clé de l’étude préliminaire. « Je suis curieuse de connaître les résultats de ces entretiens », confie Vivianne Visschers. Les cinq étudiants font leur troisième semestre de baccalauréat en psychologie appliquée à la FHNW d’Olten. En janvier et février, ils ont interviewé les personnes concernées selon le fil rouge qu’ils avaient eux-mêmes conçu, s’appuyant sur les recherches bibliographiques menées précédemment. « Comme il s’agit de recherches qualitatives, je m’attends à ce que tous les champs soient abordés et traités. Cependant, les résultats n’aboutiront pas à des conclusions purement statistiques », tempère Vivianne Visschers pour couper court aux éventuelles attentes. « Les étudiants ont mis l’accent sur les ressources », explique Vivianne Visschers. En d’autres termes, la confiance en soi augmente dès qu’on a appris et réussi à gérer une situation. L’utilisation de ses propres ressources améliore sa confiance en soi. Aux étudiants de trouver comment les personnes en situation de déficience visuelle parviennent à optimiser leurs ressources personnelles pour venir à bout d’autres situations.
Les étudiants présenteront leurs conclusions sous la forme d’un travail, qui fera aussi l’objet d’une évaluation. « Je pars du principe qu’ils formuleront également des recommandations », ajoutet- elle. Une sensibilisation accrue est-elle par exemple nécessaire ? Faut-il diversifier l’offre des services de consultation ? Vivianne Visschers imagine que les étudiants pourraient aussi suggérer une étude approfondie sur un sujet donné. Pour la responsable de la recherche, la nécessité d’agir existe. Peut-être convient-il d’encourager l’autonomie des jeunes adultes en situation de déficience visuelle. Vivianne Visschers confirme l’importance de cette notion. La décision appartient dans tous les cas aux personnes concernées, mais encore doivent-elles savoir comment et où trouver l’aide nécessaire pour mettre en pratique leur autonomie.

Des ressources importantes
Selon les statistiques, beaucoup de jeunes adultes en situation de déficience visuelle présentent aussi des troubles cognitifs qui ne sont malheureusement pas approfondis dans cette étude. Vivianne Visschers précise : « Nous devrons absolument inclure ce groupe de personnes dans des études ultérieures. » Pour l’instant, il s’agit tout d’abord d’exploiter les connaissances de l’étude préliminaire. Vivianne Visschers devra probablement attendre juin 2025 pour en présenter les résultats. L’avenir dira si l’étude débouchera sur un projet de recherche d’envergure soutenu par l’UCBA.